Aux Canaries se font la belle

Catégorie : S.1 Gran Canaria

S.1 ép.4: Guigui, le meilleur de Gran Canaria!

 9 janvier 2017.

On croit quitter pour la dernière fois Las Palmas capitale. Notre direction? Il n’y en a pas vraiment, on pourrait passer par plusieurs chemins, le bijou que nous cherchons est à l’autre bout de l’île. La buena onda nous montre la voie, c’est le moment de découvrir Tufia, pueblo pescador dont on nous a vanté la pure et simple beauté.

Concernant le stop, les conducteurs évitent soigneusement nos regards surtout les types sólitos dans leur big pick-up. C’est pas coutumier dans le coin de ramasser les vagabonds du continent. Ils prennent un billet d’avion jusqu’ici tout ça pour tendre le pouce: son locos o qué? Ce parti-pris ne regarde pas les autochtones sauf quand ils s’appellent Alicia et Antonio.

« Los milagros son acontecimientos diarios chacho ».

Nous arrachant d’une interminable route en épingle, notre couple-miracle se fréquente et plus encore au quotidien depuis 44 ans. Nos sacs atterrissent dans la remorque pleine d’herbe fraîchement coupée. Pour nous faire plaisir, sans qu’on leur demande rien, ils nous font passer par le barranco de los Cernicales, gros repère de canyoneurs en quête d’adrénaline. Nous traversons ensuite el Valle de los Nueves (parce qu’au départ, il n’y avait là que 9 maisons pour la petite histoire…)

Le couple d’abuelos nous espante par sa fraîcheur « c’est vrai qu’on a un peu peur des auto-stoppeurs » et son grand cœur, « vous pourriez être nos petits enfants »: Lui, son œil de cabotin farceur, elle qui s’amuse à nous confier combien il était séducteur…Alicia et Antonio décident de différer leur trajet habituel pour dépasser la bruyante agglo de Telde et nous poser comme des fleurs sur la côte, juste devant un village miniature gravé dans la falaise.

Tufia, le plus charmant endroit qu’on ait vu jusqu’à présent, paisible comme une sieste d’été, grandiose à la nuit tombée; ses petits bateaux de pêche qui dansent sur l’eau turbulente et…toutes les 10 minutes à peu près, au dessus de nous, un gros oiseau de fer surgissant d’un trou noir!

Virée pédestre dans les dunes caillassées jusqu’à Ojo de Garza, petite baie pleine de caractère mais aussi littéralement collée à l’aéroport.

Instant fraicheur enveloppé d’un rhum-miel en clair-obscur et vue retour sur la somptueuse Tufia dont les flash lumineux nous révèlent quelques cuevas inaccessibles.

L’art du lâcher-prise se pratique tout naturellement au pied de l’eau…Campement sur la crique d’à côté et réveil endolori sur les industries qui grignotent la ligne rocheuse face à nous.

Une chouette nana nous monte jusqu’à Melenara: Sardines grillées et baignade enfantine sous les auspices d’un Poséidon marbré.

Jumping dans la guagua pour se franchir un Telde-Mogan, soit la moitié sud de la isla. On serait arrivés à Mogan-puerto avant la nuit si l’on ne s’était pas ejecté du bus au moment de passer Maspalomas pour visiter les 2 postes de police..Un saludo à la nationale puis un renvoi à la team municipale pour voir s’il n’y a pas un quelconque appareil photo qui attend sa mamita au bureau des objets trouvés. Opération stérile, qui aura quand même eu le mérite d’entériner la fin d’une belle histoire d’amitié…

Mogan plage, ça fait rêver non?

Puerto de Mogan, nos valises accrochées aux paupières, la Venise gran canarienne comme ils disent nous laisse hagards avec sa rue spéciale fruits de mer, l’autre dédiée à la pizze italiana, impression de déjà vu, une colonie pour nordiques retraités de plus…On se précipite dans les arrières du port, là où sont empilés les casiers de pêche bouffés par la rouille, au bord de la falaise, on a les bras ouverts sur le monde, une acoustique d’enfer et le sol qui va avec, du genre à disloquer des piquets de tente en titane…

Le cadre sent le fric, nous c’est plutôt  l’Afrique…

…avec nos frusques qui crachent de la poussière! Au moment de quitter ce guépier, on jette un petit coup d’œil au centre de buceo et un ange tout en blondeur nous offre 2 masques de plongée; Lucia, grâce à toi, nous allons enfin savoir ce qui se trame sous l’océan, yeppaaa, on a la grosse platano (la banane espagnole)!

En 2 coups de pouces, on se fait une pause bocadillo à Mogan Pueblo, otro dedo et nous voilà au milieu des montagnes. Dans un virage serré du col, deux vieux allemands prennent la peine de s’arrêter sur le bas-côté, et la femme trifouille dans sa tête avant d’hennir dans un very mauvais anglais: « It is not allowed ». 3 fois. Apparemment la connerie ça c’est autorisé!

Heureusement pour nous, les bonnes personnes sont aussi dans la place. Gway, un gars de La Aldea, comme son nom l’indique est beaucoup plus cool et nous dépose à Tasartico avec un « cualquier cosa que necesitais allí, hablan con William quien es mi amigo »! Vaya, un saludo y muchas gracias chacho!! Nous sommes là, devant la dernière casa de Tasartico à tenter d’alléger nos sacs au maximum pour atteindre la fameuse playa Guigui qui tournoie dans nos têtes comme l’accomplissement d’une prophétie…Quand soudain, un petit bonhomme sort de la casa avec sa gitane au bord des lèvres et s’assoit bien tranquillement pour profiter du petit spectacle de gringos. Juan Olivo se marre et accepte de garder une partie de notre équipage pour les 3 prochains jours.

Une caminata sublime pour atteindre la tant rêvée Guigui:

2h30 de montée entre les euphorbes et cactus avant de redescendre sur un chemin parsemé de fleurs aux noms enjôleurs: malfurada, crestagallo, tajinaste…

« Fijate en lo que tienes »

Concentre-toi sur le ici et maintenant…

Une plage cachée, sauvage, sans doute la plus belle de l’île.

L’entrée du paradis coincé dans la roche.

Une poignée d’habitants permanents: William et Patricia installés sur les hauteurs, leur huerta (jardin) perma-cultivée, mmh leurs fruits de la passion, nous n’avions jamais goûté de jus plus frais…À même le sable, quelques campeurs à l’année, parmi eux, un retraité qui se nourrit en pratiquant la chasse aux poulpes.

Nous rencontrons aussi un adorable couple de jeunes écossais ainsi que Roberts, réplique du Robinson de Seul au monde qui devient poco à poco zinzin. La première fois qu’on l’a vu, il courait couilles au vent avec de maigres branchages dans chaque mains. Roberts a le bout des doigts noirci par le bois calciné de tous les feux qu’il prépare pour chauffer cette étrange mixture qu’il appelle encore du café. Faisant trembler la longue tresse rousse qui lui pend du menton, Roberts ne sait plus s’il est allemand d’origine ou polonais depuis le temps qu’il voyage. Il a fui le Maroc car les flics le traquaient, sous prétexte de le protéger…Il ne sait bien entendu plus quel jour on est, par contre il cherche désespérément du sucre pour assaisonner ce qui lui reste de café.

Le dit Robert courant nu sur la plage.

Nous profitons de la marée basse pour se balader sur les deux autres baies, la seconde, longue étendue de sable encastrée dans la falaise, et la suivante parsemée d’habitats légers, cahutes et murs de galets. Avant le grand large, une peuplade de crabes noirs et dorés gigotent sur les parois dont les creux servent d’abris aux bigorneaux et bernardo hermitos qu’on apercoit en surbrillance.

Les vagues nous embrassent les pieds avant de les lécher vigoureusement, il est temps de rejoindre notre casita sur la 1ère playa.

Guigui paradisio, 2ème soirée: Alors qu’on part à la mare aux grenouilles pour se ravitailler en eau potable, nous tombons comme de bonne aventure sur Berber et Franki, nos 2 amigos rencontrés à Las Palmas quelques jours plus tôt. « Asi es la vida »! Nous regardons le coucher de soleil bien conscients de cette magnifique journée. Objectif: tout faire pour que la suivante soit aussi belle!

3è jour. Le soleil se fait attendre derrière l’imposante falaise. Dès qu’il est là, nos 2 hollandais vont se faire claquer les fesseaux par la vague. Yoga sur sable noir, il est déjà l’heure de se dire au revoir…Nous saluons aussi William y Patricia avant d’entamer la caminata du retour tout en douceur, grappillant quelques fleurs d’ail au passage.

Guigui est désormais derrière nous…Juan Olivo, l’abuelo de Tasartico n’a pas bougé, égal au lui-même de ces 78 dernières années. On taille la bavette avec le sympathique monsieur et récupérons nos besaces avant de repartir en mission stop.

Demain, nous partirons de Puerto de La Luz et prendrons un ferry pour Santa Cruz de Tenerife après un desayuno de crêpes au nocciolla chez l’amigo Vittorio.

L’île en forme de concha disparaîtra alors derrière la brume pour laisser entrevoir les contours d’une nouvelle saison.

Prochain objectif: Rejoindre l’équipe de Javi hermano à San Miguel Marina pour un WE apéro, musico marinero*

S.1 ép.3: Mission explo de la Costa norte.

Du 4 au 7 janvier 2017

Mission stop Lugajeros-Agaete: Route magique qui serpente entre les sommets aux mille cavités secrètes avant de finir sa course au bord de l’océan.
Passée la lumineuse Galdar, grignotant les versants d’une montagne autrefois vénérée, el coche nous laisse en plein Agaete: Nos compagnons prennent le temps de nous montrer le meilleur bar de la place, en pleine confiance nous allons y passer toute la soirée.

« La perrola », son patron taciturne, le vino casero et ce petit couple avec qui nous entamons la conversation. Collin habite à la Palma, il s’est inscrit comme étudiant en formation de garde forestier. Juglia ne faisait que passer sur la petite île occidentale avec sa moitié et le vent s’est mis à tourner. Se sentant de trop, la moitié de Giulia est répartie de son côté et c’est ainsi que naquit un nouveau duo d’apprentis tourtereaux.

Giulia nous met en garde à propos des bouleversements émotionnels que peut provoquer La Palma qu’elle a rebaptisé pour l’occasion « la lavadora ». Passer notre amour à la machine…Historias de corazon, de couples qui se délient, se recomposent, d’associations surprenantes, de combinaisons fortuites….Coïncidence ou réalité de la science? Le plus grand des mystères humains…
Notre quatuor se délocalise pour continuer la fiesta en musique au bord de charcos (piscines naturelles) accompagnés de Raïco, impressionnant golgoth qui descendant du peuple guanche.
Nous concluons la journée par une virée dans un parc et une installation sommaire à l’abri d’une maloca (hutte).

Un dia nuboso soldé par une fuite vers la capitale.

Réveil bavard malgré nos têtes en coltard, Collin et Giulia remballent tranquillement leur petit hamac pendant qu’on se laisse embrasser par la langueur insulaire.
Découverte du port, camp de base du ferry-express pour Tenerife, à bâbord le catama’stodonte et une paire de barcasses en berne, à tribord une écrasante montagne à la mordor.

Abasourdis par ce triste décor, nous nous précipitons aux piscines naturelles pour y brasser nos corps de loutres sales sous un petit crachin.

De tout discret, le grain se fait omniprésent et nous nous laissons porter par nos nouveaux compères en sautant dans la guagua de 17h pour rallier la grande capitale.

Première session dans la gran ciudad de Las Palmas.

À peine sortis de la guagua station, on se fait inonder par une nuée de populasse agglutinée dans les calles pour assister au défilé de Los Reyes Magos. À côté de la plaza San Telmo, une foule pleine de gosses en transe bouffe des yeux les chars de bob l’éponge et mickey, bienvenus dans le noël à l’espagnol. De zigzags en esquives, on tombe sur notre providence, le café autogéré  » Despacio » qui nous adopte direct et dilue notre fatigue avec ses bières artisanales et sodas-guaranito. Concert de « Carretero infinito », ukulele, harmo, percus et chant super faux!

Ils sont adorables mais quand ils s’arrêtent, nos oreilles peuvent enfin respirer de nouveau; Vaya, à nous de jouer! Dans le coin biblio communiste, il chevauche le piano, elle sort le saxo et très vite autour de nous ça se rassemble! Berbèr et Franck le roi du saxo, Yuko et Daniel duo germano-japonese et le meilleur pour la fin j’ai nommé Vittorio l’italiano vero et Juana sa chérie bulgare serveuse du Despacio!

La jam nous monte au ciel mais il est bientôt l’heure de voler de nos propres ailes. Quelques bars intermédiaires plus loin, nous entamons une éprouvante caminata le long du port pour arriver enfin à la playa Alcaravaneras où nous nous échouons comme des baleineaux dans une mini barque qui nous protège du vent. Gracias Mamacita ola, pour ta bienveillante berceuse permanente…

Lendemain matin, accolades d’au revoir avec Collin et Giulia au café du port.
Le couple amoureux lui aussi se disloque. Un « il », une « elle », valse duettiste qui roucoule dans ce nid bananier avant que ne vienne le temps maudit qui les regardera mal gré se séparer. Deux oiseaux équilibristes dans la pesanteur de leurs folles envies, l’agitation bruyante de leurs ailes en feu qui cherchent à rejoindre ensemble le bord de l’eau, pour sa ligne de fraîcheur…
On entend les marins de plaisance discuter au sujet d’un vent de sud-est, qui perle en rafales atteignant les 60kms/h. Aujourd’hui les voiliers, statues de cire, resteront figés dans la marina. On oublie le plan bateau-stop pour rebondir sur l’idée de sortir au plus vite de babylonia city.

Guagua, retour au calme de la provincia.

On visite Arucas, célèbre pour sa distillerie de rhum, et peut-être aussi pour sa basilique gothique toute vêtue de noire, veuve glauque en paradoxe avec l’esprit petit village blanchi de chaux. On grimpe comme des chèvres entre éboulis et figues de barbarie, nous frayant un chemin escarpé pour éviter la piste macadam. Superbe vue panoramique sur les voisines Fuerteventura et Tenerife si fière d’arborer son monte Teide. Redescente de l’extrême, rasant les murs en décrépitude des cultures bananières. Un couple d’allemands finit par nous prendre en pitié et nous ramène à la vie, cherchant comme nous les caresses de l’eau.

Pause détente et baño sur la crique charmante de Puertillo.

 Ballade sous la lune et accueil de luxe al « Huequito del Nino », piscolabis (bar à tapas) bien tipico où tout est bon et barrato. Les petits papis picolent devant le football partido pendant qu’on reprend vie face aux tapitas: ensaladilla de pulpo et ropa vieja, la spécialité canarienne composée de pois-chiches et triple viandes en sauce. Chauds pour se coucher ultra tôt, tout peinards dans la criquounette de Puertillo, quand soudain, v’là t’y pas qu’à 22h30, trois coños de mal éducado décident de nous attaquer en utilisant un gros matou grabataire (ou défoncé à la souflette par leurs soins malfaisants, on ne le saura jamais…) comme projectile. Bruit sourd contre la tente et hurlements à la mort du gato loco; Nuit entrecoupée de stress et méfiance, les trois borrachos restant là à médire de nous le cul et la botella posés sur leur muret.
Au matin, encore tout remués par cette phase malsaine tout droit tirée d’un mauvais remake d' »Orange mecanique », on se ressert une réconfortante salade de pulpito bajo el sol…

Puis on part se faire les chevilles dans la caillasse en quête de la « Quintilla », spot à grosses vagues de surfistas. Le sourire de Julien m’éblouit encore plus que le soleil. Baignade purificatrice, on repart à bloc d’oxygène iodé.

Retour à Las Palmas pour boeuf sur toit-terrasse.

Arrivée sur la paseo avec vue sur la playa de las Canteras, on sirote un zumo de mango. Pas pressées de déferler, les vagues en cette fin d’après-midi sont aussi tranquilles que les canarios.
Vittorio nous a invité à sa soirée musica sur techo.


On retrouve avec bonheur toute l’équipe du café despacio: Parmi eux, les amoureux  hollandais, Francki et la solaire Berber qui déploit pour nous ses talents de conteuse avant qu’on aille se coucher sur un petit nuage, la tête pleine d’images oniriques inspirées par son histoire chevaleresque.
On squatte dans une tente d’ami mise à notre disposition sur le toit, et nous réveillons mi-reposés pour le brunch collectif. Ju veut changer de tête, Del débute alors sa carrière de coiffeuse réalisant une tonte spéciale look de footballeur; Un Julito tout neuf et ça repart!


Compras au mercado de Vegueta, passons devant la casa de Colon avant de sauter dans la guagua pour San Mateo, pueblo spécialiste du quesito fresco.

Prochain objectif:

Plein Ouest pour Guigui, la playa de rêve cachée derrière les falaises.

S.1 ép.2: Caminata au coeur de la caldeira

2 janvier 2017

Objectif pressant:

Sortir du « Sonnenland » (pays du soleil en allemand) pour germains en quête de bronzette, campo de concentration bétonné kitsch comme un cartoon de Disney sous acides en voie de péremption.

Loongue épreuve de marche en peine sur une 4 voies bordée de palmeras.  Un italiano à la retraite nous avance de 500m jusqu’à San Fernando pueblo, c’est toujours ça de pris, encore quelques pas et nous trouvons l’arrêt de bus pour Fataga, bastion de la sierra bonita. Première rencontre avec un adorable couple canarien, suivi d’une session croquetas-fogonero à la plancha quand soudain, vision d’horreur, chute de tension: elle voit son appareil photos incassable, équipé de la wifi qui va sous l’eau et en bonus prend de supers photos…elle voit son joujou enseveli dans les dunes. L’âme meurtrie, elle se répète alors toutes sortes de mantras sur l’impermanence des choses et que le seul truc qui compte vraiment c’est le présent, là et maintenant. De sages paroles saharahouies complètent ce premier pansement: « quand tu arrives au désert, écris sur un petit bout de papier ce dont tu veux te débarrasser et enfouis-le ». Peut-être un coup de l’inconscient, une piqûre de rappel, diffusant ce lancinant refrain « on ne voit bien qu’avec les yeux »….Passons et livrons-nous donc à l’instant.

Le couple canarien nous a parlé d’un mirador dans un virage, meublé de barbeucs en pierre. Le chauffeur ne comprend pas qu’on lui demande de nous laisser là mais on a aperçu une petite lumière derrière la route. On tombe sur deux amoureux tchèques qui se réchauffent devant leur fogata fleurant la pomme de pin. Autour d’une bouteille de tinto, ils nous racontent les interminables plages désertées de Fuerteventura et sont émus quand on sort nos intrus. Pour seule mélodie ces 15 derniers jours, ils n’ont connu que les ondes radio reggeaton des Guagua… Détendus,nous regardons les dernières flammes dansants dans l’âtre, puis les lumières de la civilisation au loin,puis le ciel et sa multitude de petits astres fous. Buenos noches, nos vemos mañana para subir al Roque Nublo, felices sueños amigos!

En installant le campement,on se dit dans un sourire qu’il ne fait pas si froid, s’raient pas un peu marseillais ces coquins de canariens?…4h plus tard, Ju se réveille en sursaut d’un sale songe où cul nu glaçon, il cherche partout son caleçon. On se couvre comme on peut, à la limite d’enfiler en surcouches le contenu intégral de nos sacs tout en se faisant niaisement la remarque qu’on nous avait pourtant prévenu.

Mâtinée suivante, débarbouillage au petit robinet d’eau fraîche, merci mère montagne pour ce bien tant mercantilisé en bas chez les côtiers…Première petite brouille, on avait rdv avec les tchèques pour la caminata, il traîne un peu, elle chouine et s’impatiente, il lui dit de partir devant, elle fonce jusqu’à Tunte. Il l’a perdu de vue, rien ne va plus et comme il aime le danger, il se trompe de chemin. Elle boit son café quand il déboule tout hirsute, penaud, déplumé, ouf ils se sont retrouvés! Les tchèques par contre sont déjà loin. Il et elle se rattrapent sur un gros déjeuner d’atun frito con papita caliente.

Pour la première fois, nous laissons nos maisons cousues de nylon aux tenanciers du bar et partons tout légers vers l’alto Roque.

Grimpette un poquito fatale pour nos jambas grippées, reçevant maintes électrochocs au passage des trekki-bikers de l’extrême qui nous narguent avec leur culs de fer pointant vers le firmament.

À 1600m, l’altitude manque de nous décrocher un poumon mais le paysage est magnifique: les immenses rochers du Pic de Pargana nous surplombent, sertis de cavités et stries basaltiques. Vue imprenable, vent cinglant, Del cavale comme un cabri et Ju joue à l’âne batté. On passe la 5ème pour une descente active qui décrasse nos genoux et laissons derrière nous les majestueux Roque Nublo et Pico de las Nieves: Lindo, relindo le chemin tapissé de pierres en petits murets.

 

Un petit couple d’allemands abrège nos efforts en nous laissant monter dans leur carriole de loc. Arrivés à Tunte pour le crépuscule, on récompense ces 4h de belle rando avec deux gros shots de guindilla, le vin cuit local qui nous provoque des secousses sismiques à l’estomac.

La question de faire du stop est vite éludée par le triomphe de la totale obscurité. Del entreprend d’escalade le mur d’un hôtel désaffecté. Trop glauque. Pendant que les petits vieux squattent l’auberge du Tunte éructant leur favorite émission Tv, on avance jusqu’au pont après la sortie du bled. Là au bout d’un chemin de terre nous attend notre première nuit 1000 étoiles dans une cueva (grotte). Il y a un emplacement avec des restes de braises, on se prépare une flambée qui forme un épais nuage de fumée et envahit bientôt la moitié supérieure de notre habitat. Veillant à rester accroupis dans la zone salubre, on met à profit ce mince couloir d’oxygène pour faire résonner le ventre de la montagne avec des mélodies de l’âme qui s’en vont flotter vagabondes jusqu’au fond du canyon.

 

Après cette douce nuit de musicalité diffuse, Ju cueuille des amandes qu’il tend à sa belle avant de réaliser qu’elles sont trop vertes et porteuses d’un poison mortel. La mort les a seulement effleuré, l’aventure peut continuer!

Nous quittons notre cueva d’amour pour nous engouffrer dans une Guagua qui nous sert un tour panoramique en accéléré de la caldeira (cratère).

Les restes du volcan effondré occupent tout le centre de l’ île et au milieu de ce chaos minéral trône le fameux rocher des nuages, culminant à 1949m. Le chauffeur bien sympathique nous laisse à Tejeda, pueblo tranquille nous offrant le meilleur des points de vue sur la gigantesque depression de failles concentriques. Les amandiers en fleurs foisonnent dans le secteur mais leurs fruits ne seront mûrs qu’au prochain printemps. Pour n’être pas en reste, nous savourons un deliciossissimo brownie de almendra au resto du même nom.

Mission stop jusqu’à Artenara, 1h pour accomplir 5kms de lacets, ouf por fin nous y voilà mais oups, les têtes creuses ont laissé leurs mobiles branchés au resto Almendra! Il part en expédition tel un guerrier affamé, elle garde les sacs perchée sur une falaise arrosé d’un soleil meurtrier. 2h de lutte acharnée plus tard, ça repart avec des promesses de Pierre Richard qui décident de faire plus attention.

Un vieux bourru nous prend jusqu’à Coruña et nous montre du doigt un sentier qui tombe en rigole jusqu’à Lugajero, magnifique village logé dans un barranco fertile (ravin dans les parois d’un volcan). Instant magique lorsque la lumière tombe en éclipse sur ce petit paradis.

La magie se prolonge alors qu’ayant avancés jusqu’à un gros barrage, au bout de la vallée qui a toute vitesse se rafraîchit,nous nous pensons bloqués pour la nuit . Une voiture surgit et nous propose un réconfortant trajet direct à destination d’Agaete.

Fin de l’épisode 2.

Dans le prochain épisode, retour à l’eau avec l’exploration de la côte nord…

 

 

 

 

S.1 Épisode 1: Vamos a las dunas!

Direction Maspalomas au sud de l’île:

On nous avait prévenu mais ça dépasse nos capacités d’imageries mentales; Pour atteindre les dunes, il faut traverser des kms d’immenses barres de complexes hôteliers sertis d’oasis artificiels, le tout confiné sur le littoral mangé par un désolant désert de pierre. Alors qu’on pense avoir atteint le paroxysme de la sidération, on aperçoit au bout d’une pointe fendant les vagues fatiguées une vieille immonderie d’usine à ciment.

Passée l’hécatombe, nous élaborons un plan d’action: Trouver refuge au pueblo suivant pour reprendre des forces et revenir sur nos pas afin de passer la nuit au petit port de Pasito Blanco, accolé au big centro urbanizado derrière lequel se cachent les dunes.

À Erguineguin, les hamburguesas de cerdo tiennent leur promesse en terme de graisse saturada qui tâche tripes, tee-shirt et carnet de bord. Notre première baignade rafraîchit tant nos petits corps suintants que nos âmes en flottement et le premier apéro-playa au pro-secco, sorte de champagne du pauvre finit de nous remettre d’aplomb pour notre première mission stop.

Pasito Blanco, arrivée de nuit, en fait de petit puerto, nous devons passer un check-point et réalisons que nous pénétrons l’enceinte ultra sécurisée d’un centre de villégiature pour riches germains amateurs de tranquillité dans quadrillage de villas haut standing aseptisées. Partout des rambardes, du petit parc de jeu à la marina en passant par la plage. On rencontre trois petits irlandais en mal d’action qui mettent toute leur rage à battre des chaises contre l’asphalte aux seules fins de fuir leur ennui. Il reste du pro-secco dans la botella, c’est le dernier jour de l’année, une bonne raison pour trinquer, au diable les conventions,sont loin d’être majeurs mais ils biberonnent fort qu’on s’empresse de poser l’objet du délit dans un coin quand leur pater vient les chercher. Yeah, happy new year guys! C’est la première fois qu’on monte notre tente et ça nous fait quand même tout bizarre d’être installés sur une mini playa privatisée…

Feu d’artifice, on s’endort avec le bouquet final et quittons notre crique au petit matin avant l’arrivée des troupes armées de seaux, écran total, pampers et baleines gonflables.

On entame notre première marche sportive par la traversée d’un green surplombant la côte.  Des papis golfeurs nous observent mi hilares-mi hébétés; En contre-bas, la playa de Melonera et son paseo pavé de boutiques à glaces, paellas et accessoires chinois. On entame une dégringolade à pic le long d’une rigole caillouteuse, les rotules en castagnettes, et arrivons au beau milieu d’un flux de touristes hyper relax. Chargées comme des mules, nos épaules râlent, normal, c’est le début du travail, vivement qu’elles se taisent et se tannent… Grisés malgré nos petites brisures articulaires, nous atteignons le phare de Maspalomas, simple et austère point de contraste entre l’upper class et les franges populaires flânant bien peinards sur la playa del inglès. Nos cœurs s’emballent lorsque qu’enfin se dévoilent à nous d’immenses poitrines de sables…

Les vendeurs afros essayent de nous refiler des sacs dolte galbano et autres montres fervex valant peau de balle en vue d’envoyer quelques sous à leur familia chaque fin de mois. Des cabanons à thèmes, « Irish beer », « San Fransisco gay », « Sonnen wurst land », en veux-tu en voilà… On se prend des pintes au « Paddy’s on the beach » et prenons plaisir à observer ce petit monde entrer nonchalamment dans l’ère 2017; déambulations joyeuses vite fait croquées sur nos cahiers d’écoliers. L’océan ronronne et nos estomacs avec, c’est là qu’on se demande combien de temps un être humain peut tenir en se nourrissant exclusivement de beer…Supermercado fermé, 1er janvier, jour férié, nous finissons attablés au resto devant des plats de chipirones et sardinas nous pliant sans rechigner aux mœurs de la foule hétéroclite venue passer ici du bon temps au lieu de se les geler dans leurs contrées.

1ère session combo rhum et musique au bord de l’eau, chaque note qui retentit est un merci à l’atlantico. Le vent se lève et finit de nous lessiver, il est temps de se diriger vers les dunes pour établir notre campement de fortune.

Superbement installés, à la lueur du crépuscule canariense, on se sent comme des rois du désert, mais le froid souffle fort et nous tire plusieurs fois du sommeil jusqu’à ce qu’un gardien de l’aire protégée nous somme de dégager du coin. Il a raison, l’amende muyyy salada nous gâcherait quelque peu le bonheur d’être là, surtout qu’à quelques dunes près, on aurait pu se retrouver au beau milieu d’un gang bang à l’international sponsorisé par la communauté gay. Oui le gardien a pris le temps de nous renseigner sur les coutumes du coin, seguro que les canarios son muy buena gente.

A y est, on attaque les crêtes de dunes, et entre deux bosses sableuses tombons nez à cul avec des néo-explorateurs toujours plus avides de faire bronzer leurs attributs, et plus si affinité…

C’est pas Gobi, c’est pas l’Sahara non plus mais ça en jette bien, ces bas en haut nous emballant crescendo dans leurs rouleaux dodus. Une fois passées les portions de plages privatisées par le club mickey mi-gay, les ocres vagues se creusent, formant des ombres grandissantes qui peu ou prou nous engloutissent.

Nous surfons de pics en crêtes jusqu’à ne plus voir autour que des volumes ubuesques coupés d’un dégradé de lignes turquoises, quand soudain, surgissant de nos petits corps, une folle envie de piquer une tête dans le bleu du décor!

Pour clôre ce 1er jour de la nouvelle année, nous partager un samba tout frais péché à la plancha, poisson rose surplombé d’un rhum miel, duo de choc qui nous font trémousser les papilles et l’arrière-train. Un grand dadais gracieux dans sa transe fluorescente danse un flamenco-techtonik endiablé comme s’il était dans un rainbow devant le mini mercado, il parle aux touristes sur la terrasse comme s’ils étaient tous au rainbow sauf que les gens de la terrasse fréquentent sûrement pas ce genre d’endroit; J’aime ce mélange de genres, il y en a pour tout le monde, à bas les préjugés, putain qu’est-ce qu’on a de la chance d’être là, sous le soleil caloroso des canarias!

Saison 1: Deux allers simples pour Gran Canaria s’il vous plait!

Des au revoir en fête, couronnés par un gros câlin collectif avec la familia toulousaine…

Aéroport, café fumant pour dissiper la brume glaciale, merci Jo d’avoir laissé ton sommeil en veilleuse pour emmener les deux cocos tout excités.

Zone d’attente, piano en libre service, morceau improvisé qui dézombifie les voyageurs.

5 heures du mat’, j’ai des frissons: Parés à embarquer!

25 passagers dans le boeing, nous quatre y compris en comptant Sax et guitare sagement assis à nos côtés. Fallait nous dire on aurait rencardé les amis…

Paupières mi-closes, la ville rose nous envoie ses derniers signaux lumineux.

3h de ballade au pays des nuages et boom, sortis de l’oiseau d’acier, on gagne 10 degrés!

La « Guagua », bus local, nous emporte dans le petit village d’Aguimes, qui nous laissera une impression de départ enchanteresse. On s’empressera de commander nos premiers deux cafés con leche assortis de tapas bien grasses et la spécialité locale, las papas arrugadas, patates grenaille en robe de sel.

« Aux ailes artificielles, ayant délicatement propulsé nos corps enrobés de nuit blanche vers ces îles tant attendues…

Ciao douce France, à nous les palmiers qui bandent, nuées de cactus, fourmillements de geckos, facades hautes en couleur… »

Objectif dunes

 

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